« Le cul de ma femme mariée », roman, Quorum, 1998...
El culo de mi mujer casada - De kont van mijn getrouwde vrouw - Evunda ya mwasi na ngai ya libala
Extraits
30
- Est-ce bien nécessaire ?
J’avais encore un truc à te dire mais je ne sais plus quoi. Je te téléphone pour me rassurer:
- Si tu vois une idée, comme ça, une phrase toute faite, par terre, qui traîne, tu la ramasses et tu me l’amènes !
Je tombe sur Eric (l’aîné de la bande des fils) (quand il en a gros sur la patate, j’ai trop envie de l’embrasser au creux du nez, entre les yeux) (mais il n’aimerait pas ça ?) (plus très ?).
- Elle a laissé des instructions, elle ne veut plus qu’on la dérange, elle n’est là pour personne !
- ...
- Même toi !
(Surtout moi !) (et d’ailleurs je lui aurais déjà téléphoné, non ?) (il n’y a pas 10 minutes) (j’aurais déjà eu ma dose, non ?) (faudrait gaffer à n’pas pousser l’bouchon dans les orties, quoi !).
Quoi ! Rentrée en force du Pape (avec le concours de l’AFP, de Reuter, de la presse écrite et de toutes les chiennes de télévision).
Effervescence à la clinique Gemelli de Rome où le Pape doit se faire opérer (une aile du 10ème étage lui est réservée) (un appartement comprenant une chambre, un salon et une chapelle à côté de la chambre). Optimisme de façade au Vatican. Confiance également du chirurgien Francisco Crucitti et de son équipe médicale.
Elle me dit:
- Ce soir, on fait l’amour, je te dois bien cela, je t’ai trompée toute la nuit !
- ...
- Avec des inconnus !
- Sans même qu’on t’ait violée ?
(La nuit, quand elle sort dans ses rêves, jusqu’au petit matin, elle n’emmène pas son mari ![1]) (Et quand c’est moi qui la trompe, dans ses propres rêves, qu’est-ce qu’elle me tire la gueule !).
Comme si de rien n’était.
On ne peut tout de même pas faire l’amour comme ça, tout de suite, juste après s’être entre-dévorés. Il faut d’abord cicatriser ?
- On se pèle un nichon (ou 2) d’abord ? (quelques préliminaires, du lubrifiant intime, une déclaration d’amour ?).
Des mots passent, je jette mon filet, je les immobilise, je les enveloppe avec gourmandise et je les vide de leur substance (ils tentent en vain de se dégager). Je secrète des sucs digestifs, des désespoirs gluants, qui les réduisent à l’état liquide[2].
On a trouvé un rat mort (noir, adulte, femelle, âgé), exsangue, rue Maesstraaat, à Ixelles-Elsene. Tout le monde a son rat. Moi, d’habitude, je l’appelle par son petit nom et je lui fais la conversation. Devant tout le monde, sans me gêner. Aujourd’hui, je fais semblant de ne pas le reconnaître.
Le Vatican a démenti, jeudi, les rumeurs selon lesquelles le Pape souffrirait à nouveau d’une tumeur au côlon.
Les fidèles catholiques ne semblent pas prêts à accepter sans réserves les nouvelles déclarations du Vatican.
D’après l’agence catholique Asca, généralement bien informée, les médecins n’excluent pas une récidive de la tumeur bénigne dont le Pape avait été opéré en 1992. (Faut-il interdire l’accès des salles de cinéma et des restaurants, les soirées entre amis, aux Papes porteurs d’anus artificiels ?).
Elle me demande de lui étaler de la graisse blanchâtre sur les épaules et dans le dos. Et de la masser en profondeur, avec application, talent, dextérité. Que ça pénètre bien. Et d’y prendre plaisir, de trouver ça érotique. Je me révolte (mais je m’exécute):
- Je me mets de l’after-shave sur l’écrevisse peut-être ?
On continue de démentir que le Pape soit atteint de la maladie de Parkinson. Pourtant sa main gauche n’arrête pas de trembler. Je l’imagine serrant la pince à Mohammed Ali, (je l’imagine en train de pisser du vin de messe derrière le presbytère de Kinkempois, de Waha ou de Couture-Saint-Germain !), allumant la flamme olympique des Jeux de Sydney:
- Trixx-trixx ? scratch-scratch ?
- Smurf !
Ce week-end, on ferme. Relâche. On ne reçoit personne. Pas de Veuves et pas de Garçons (et encore moins de couples !). Lianja (le troisième de la bande des fils) a reçu toutes les instructions nécessaires (il fait ça très bien) (Lianja-le-futé).
JPJ aura beau sonner (klaxonner, tambouriner) à la porte, on ne lui ouvrira pas (il ne passera plus pendant 15 jours) (boire sa bière) (ou son cabernet espagnol) (prendre son courrier) (se faire piquer ses clopes et son briquet Sikkens) (il ne téléphonera pas non plus). (Et na!):
- Ils sont sortis !
- ...
- Je ne sais pas. Ils ne m’ont rien dit ! (ils ne disent jamais rien !).
Les loups reviennent d'Afrique.
On se réconcilie. On normalise. C’est programmé ainsi.
[1] Je la caresserai pendant son sommeil (le dos, le cou, les fesses) (le bas du ventre et l’intérieur des cuisses). Le lendemain matin, elle me racontera son rêve:
- Un rêve horrible, quelqu’un me repassait !
[2] Un désespoir gluant me tenait par la main jusqu’à ce que je m’endorme. Et guettait mon réveil, en embuscade. Seuls quelques rêves adroits parvenaient à lui échapper.
